mercredi 11 février 2015

Nhận diện tinh vi

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Caroline Thanh Hương

 

Cette intelligence artificielle est si puissante qu’elle est capable de vous reconnaître sur n’importe quelle photo


Protéger sa vie privée sur Internet devient de plus en plus compliqué et le système de reconnaissance faciale DeepFace, propriété du réseau social Facebook, n’arrangera rien. Désormais capable de vous identifier sur n’importe quelle photo où vous apparaissez, il symbolise une avancée technologique qui en inquiète plus d’un. DGS vous en dit plus sur ce système qui fait débat.
Si vous apparaissez dans une photo lors d’un rassemblement public ou autre manifestation, seuls vos proches pourront vous reconnaître. Chose que ne pourra probablement pas faire une machine… du moins pour l’instant. A moins qu’un ordinateur ait été chargé de vous rechercher, qu’il dispose déjà d’une douzaine de photos de vous et qu’il ait une haute qualité d’image pour pouvoir les examiner, votre anonymat ne risque rien. Il n’est pas encore possible pour un ordinateur de parcourir l’ensemble des photos mises sur la toile et de vous retrouver. Mais dans le jardin fermé de Facebook, qui contient de loin la plus large panoplie de photos personnelles dans le monde, la technologie dispose de tout ce qu’elle souhaite pour s’épanouir.
Le système de Facebook « DeepFace » est aujourd’hui extrêmement précis et possède les outils nécessaires pour procéder à des reconnaissances faciales sans que la personne ne soit taguée. « L’objectif n’est pas de violer l’anonymat de 1,3 milliard d’utilisateurs de Facebook », explique Yann LeCun, scientifique à l’université de New York et directeur de la recherche en intelligence artificielle chez Facebook. « Le but est plutôt de le protéger. » Une fois que DeepFace identifie votre visage parmi les 400 millions de nouvelles photos mises en ligne chaque jour sur le site, « vous recevez une alerte de Facebook qui vous signale que vous apparaissez dans une photo », poursuit Yann LeCun. « Vous pouvez ensuite choisir de flouter votre visage sur l’image pour protéger votre anonymat. » Cependant, beaucoup de personnes sont loin d’être ravies à l’idée d’être identifiées sur toutes les photographies dans lesquelles elles apparaissent, et en particulier lorsque celles-ci sont mises en ligne par des inconnus. Mais Facebook utilise déjà ce système d’identification « automatique » bien que celui-ci ne vous révèle que l’identité de vos amis.
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DeepFace n’est pas le seul cheval dans la course. Le gouvernement américain a également financé les recherches des universités ayant pour but de développer les technologies relatives à la reconnaissance faciale. Au sein du secteur privé, Google et d’autres entreprises ont développé leur projet d’identification automatique des individus dans les photos et vidéos.
Comment cette reconnaissance faciale automatique sera utilisée ? Et comment la loi pourra la limiter ? En réalité, la réponse demeure floue. Mais une fois que la technologie sera parfaitement mûre, elle provoquera sûrement autant de problèmes de confidentialité qu’elle n’en résoudra. « Le génie est, ou sera bientôt, sorti de sa lampe », affirme Brian Mennecke, un chercheur en système d’information qui étudie la confidentialité à l’université de l’Iowa.
La simple reconnaissance est facile pour un ordinateur, surtout s’il s’agit de comparer des objets aux caractéristiques communes comme des fleurs, des couvertures, des lampes… C’est le cas des visages qui disposent tous des mêmes caractéristiques ; les yeux, les oreilles, la bouche sont toujours dans la même position. Ce constat simplifie le calcul et le rend d’autant plus efficace de sorte que « nous sommes capables de détecter des visages sur environ deux décennies », ajoute LeCun. Les ordinateurs bon marché étaient déjà capables de détecter et de se concentrer sur un visage. En revanche, « identifier un visage est beaucoup plus complexe que de simplement le détecter », dit LeCun. Votre visage vous identifie de manière unique. Mais contrairement aux empreintes digitales, il est en constante évolution. Un simple sourire et voilà votre visage transformé. Le coin des yeux peut se rider et la forme du visage se déformer. Même si vous gardez la même expression, vos cheveux varient d’une photo à l’autre, surtout si vous revenez d’un rendez-vous chez le coiffeur ! Et pourtant la majorité des personnes peuvent vous identifier sans le moindre effort sur une série de photos, même si elles ne vous ont vu qu’une seule fois.
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En termes de perception du monde qui nous entoure, la reconnaissance faciale peut être « la chose la plus impressionnante que puisse faire le cerveau humain », explique Erik Learned-Miller, scientifique à l’université du Massachusets à Amherst. En revanche, les ordinateurs tentent de lutter contre ce que les chercheurs appellent le problème A-Pie en anglais. Il s’agit en fait du vieillissement, du type de pose, de l’éclairage et de l’expression. Ces différentes composantes tendent à masquer les différences subtiles qui permettent de distinguer une personne d’une autre.
Grâce au « deep learning », les ordinateurs gagnent rapidement du terrain. A l’aide d’une importante base de données, le deep learning permet de faire des miracles en termes de reconnaissance et de classification des données. Dans le cas présent, les données sont composées de multiples photographies. Learned-Miller a aidé à la création d’une telle bibliothèque aux allures de trombinoscope et de tabloïd. A ses débuts, elle était composée de 13 000 photographies provenant du Web et contenant les visages de 5749 célébrités, certaines apparaissant sur quelques photos seulement, d’autres sur des dizaines d’images. Gratuite et accessible à tous, cette bibliothèque appelée LFW (Labeled Faces in the Wild) est devenue la référence la plus populaire auprès des chercheurs qui formulent des algorithmes en vue de développer les technologies de reconnaissance faciale.
Pour un ordinateur, les visages ne sont rien de plus qu’un amoncellement de pixels plus ou moins clairs. Grâce à une série d’algorithmes, le système du « deep learning » commence par la comparaison des visages puis la détermination de leurs principales caractéristiques : les yeux et le nez par exemple. Pour Yaniv Taigman, ingénieur principal de DeepFace, il s’agit de « laisser parler la machine et les données ». Le système regroupe les pixels relatifs à un visage avec d’autres éléments tels que les bords qui définissent les contours. Plusieurs couches successives de traitements combinent ensuite d’autres éléments plus compliqués qui vont permettre de distinguer des différences précises entre les visages.
L’entrée pour chaque couche de traitement est la sortie de la couche sous-jacente. Le résultat final est la représentation d’un visage humain. La machine peut ainsi comparer les images et identifier celles qui correspondent à la même personne.
L’équipe de DeepFace a fait le buzz lorsqu’elle a décrit sa nouvelle machine dans un papier publié sur Facebook en mars dernier. Elle a notamment revendiqué la capacité de sa machine à identifier une même personne sur deux photographies différentes. L’équipe de DeepFace a rapporté un taux de précision de 97,5 %.
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Beaucoup d’avantages de DeepFace proviennent de l’intelligence du programme. Par exemple, il surmonte une partie du problème A-Pie en prenant en compte la forme en 3D d’un visage. Si les photos montrent une personne de profil, le programme utilise le peu qu’il voit du visage pour le reconstruire dans son intégralité. Cela fait de DeepFace le système le plus efficace, et de loin. Taigman ajoute : « Nous sommes capables, grâce aux capacités du système, de nous concentrer sur les différences les plus subtiles. »
« La méthode est réalisée en une fraction de seconde sur une seul noyau informatique. » C’est tellement efficace que DeepFace peut fonctionner sur un smartphone. Les représentations que fournit DeepFace sont très compactes. En principe, une base de données composée de visages d’un milliard de personnes pourrait tenir sur une clé USB.
Mais l’avantage principal de DeepFace, qui est d’ailleurs celui qui a suscité le plus de rancoeur, est l’ensemble de ses données de formation. Dans son rapport de recherche, DeepFace a mentionné l’existence d’un ensemble de données appelé SFC pour Social Face Classification. Une bibliothèque de 4,4 millions de visages obtenue à partir des pages Facebook de 4 030 utilisateurs. Bien que les utilisateurs donnent leur permission à Facebook d’utiliser leurs données personnelles lorsqu’ils signent la charte sur le site, le rapport de recherche ne fait aucune mention concernant le consentement des propriétaires de photos.
Dans l’un de ses articles, le Huffington Post qualifie DeepFace de « terrifiant ». En guise de commentaire à ce papier, l’un des lecteurs écrit : « Il est évident que la police et autres représentants de la loi utiliseront cette technologie et chercheront dans nos photos sans même que nous le sachions. » Facebook a confirmé que, par respect de l’application de la loi, le réseau social permettra aux représentants de la loi d’avoir accès aux données d’utilisateurs si la demande est faite à travers l’ordonnance d’un juge.
« Les gens sont terrifiés », explique Learned-Miller. Mais il croit que ces peurs n’ont pas lieu d’être : « Si une entreprise comme Facebook dépasse les limites, au-delà de ce qui est acceptable… elle pourra se retirer des affaires. Si l’entreprise ne respecte pas les lois, des gens de la société pourront être arrêtés. » Il estime que la suspicion ne tient qu’au manque de transparence. Alors que les chercheurs universitaires doivent obtenir le consentement explicite des personnes pour utiliser leurs données privées, un simple clic sur « Je suis d’accord » sur la licence de Facebook autorise l’entreprise à utiliser les données de ses utilisateurs. De tels contrats en ligne sont « l’antithèse de la transparence », ajoute Learned-Miller. « Personne ne sait vraiment à quoi s’attendre. » L’année dernière, l’entreprise a introduit un petit dinosaure de cartoon qui apparaissait à l’écran pour rappeler aux utilisateurs qu’ils pouvaient modifier leurs paramètres de confidentialité.
Deep05
Il existe déjà un commerce de la vie privée, parfois légal, parfois illégal. Le marché de la reconnaissance faciale pourrait bientôt représenter un nouveau poids lourd dans la technologie moderne, comme le prédit Brian Mennecke. Par exemple, l’identification des visages pourrait permettre aux publicitaires de suivre votre profil, de connaître vos préférences, de répondre à vos demandes et même de proposer des prix différents en fonction de ce qu’ils savent sur vos habitudes de consommation. « Il s’agit de pouvoir vous observer dans la foule. Vous ne pouvez pas échapper à la reconnaissance faciale », poursuit Mennecke. FacialNetwork, une entreprise américaine, utilise son propre système de deep learning pour développer une application appelée « NameTag » qui identifie les visages avec un smartphone ou même avec des Google Glass. NameTag ne révèle pas uniquement le nom d’une personne, mais également tout ce qui peut être découvert à partir d’un réseau social, d’un site de rencontres, ou même de données criminelles. Toute trace d’un individu laissée sur le Web peut être retrouvée. Facebook a réagi rapidement pour éviter un scandale en envoyant une lettre à FacialNetwork pour leur demander d’arrêter la récolte et l’utilisation des données d’utilisateurs. « Nous ne fournissons pas ce type d’information à d’autres sociétés, et nous n’avons pas l’intention de le faire », explique un représentant de Facebook par mail.
Le potentiel commercial des applications de reconnaissance faciale est problématique selon Learned-Miller. Mais il s’inquiète davantage de l’éventuel comportement abusif dont pourraient faire preuve les gouvernements. « Je suis 100 % pro-Edward Snowden », ajoute-t-il en référence à l’ancien informaticien de la NSA (National Security Agency) qui a dévoilé l’espionnage du gouvernement américain en 2013, à travers la surveillance d’e-mails et l’enregistrement d’appels téléphoniques des citoyens américains. « Nous devons être vigilants. »
Le sentiment de Learned-Miller est frappant, compte tenu du fait qu’il est financé par le US Intelligence Advanced Research Projects Activity pour développer un nouveau projet de reconnaissance faciale appelé Janus. Peut-être est-ce une raison de plus de prendre son avertissement au sérieux.
Les outils de reconnaissance faciale sont loin de faire l’unanimité. Quand certains se réjouissent d’une avancée technologique moderne, d’autres dénoncent une atteinte à la vie privée et à la confidentialité. Etes-vous inquiet de l’apparition de ce type de système ?

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